théâtre / mouvement
Quand on arrive dans le monde, on n’y connait rien, on doit tout découvrir ! Apprivoiser son corps, se confronter à son image et se construire une identité. Quelle porte faut-il ouvrir, quelle couleur choisir, quel vêtement porter ? Qui veut-on devenir ? Comment se définir sans être rangé·e dans une case ou finir dans un tiroir étriqué ? Et que faire lorsque son propre reflet décide de s’en mêler ?
Tels sont les tiraillements et les interrogations du personnage, une sorte de poupée asexuée qui émerge d’une armoire et découvre qu’elle est vivante. Se confrontant ensuite à son image dans le miroir, elle finira par s’incarner sous forme d’un double en tous points identique, mais dont la volonté s’avèrera être parfois divergente de la sienne. Mais comment faire quand votre reflet ne vous suit pas ? Ou quand votre être semble se séparer en deux entités distinctes ? Les désirs conflictuels internes du protagoniste prendront ainsi vie sur le plateau, le poussant à choisir ou à s’assumer face à la pression sociale.
La question de l’identité et de l’image de soi jalonnent le parcours d’évolution de tout être humain et cela depuis l’enfance. Qui suis-je ? À qui je ressemble ? Comment me définir ? Suis-je ce que je montre de moi-même ? Mon image est-elle le reflet de ce que je suis vraiment ? Mon genre dit-il qui je suis ? Il s’agit là de notions fragiles et particulièrement intimes. Bien que très actuelles, les questionner peut conduire à ébranler les représentations, les références, les schémas mentaux et psychologiques et engendrer des effets bouleversants tant pour soi-même que pour son entourage.
Mais le but avec ce spectacle n’est pas de développer une thèse ou une revendication, ni d’aborder le rapport à l’anatomie, qu’elle soit assumée ou subie, ni les questions d’orientation sexuelle, mais bien de transposer scéniquement et de manière ludique, une interrogation plus globale telle qu’elle se vit dans l’inconscient et les émotions. De laisser entrevoir l’aspiration de l’individu à se définir, à se construire et à jouer librement avec son image, alors que les injonctions, les codes binaires et normatifs s’insinuent dans les apparences et les habitudes
souvent malgré soi.
Dans un style onirique et surréaliste, le spectacle propose de suivre la quête d’identité d’un personnage imaginaire qui arriverait au monde, vierge de tout préjugé et de toute assignation genrée. On assiste à ses premiers émois, les balbutiements de son corps, comme ceux du
bébé qui nait ou de l’enfant qui apprend à marcher, la confrontation à la pilosité naissante, la découverte des codes vestimentaires, mais également, celle fascinante de son propre reflet. Le spectacle invite alors à plonger avec le personnage de l’autre côté du miroir pour un voyage intérieur tout à fait singulier, où les reflets peuvent prendre vie, s’interposant parfois à notre propre volonté. Il peut arriver en effet que l’on n’aime pas l’image que l’on voit de soi dans le miroir, ou parfois qu’elle n’en fait qu’à sa tête…
La scénographie s’appuie sur une grande armoire, élément unique particulièrement signifiant pour évoquer la question de l’identité. Grâce à des effets d’apparitions et d’illusions s’ajoutant aux éclairages et aux costumes, elle devient véritablement vivante et magique. Elle est traitée ici comme un véritable partenaire de jeu du personnage qui peut l’explorer, s’y lover ou s’y réfugier, comme l’enfant le ferait auprès de ses parents, mais aussi s’y confronter, s’y heurter, ou s’y perdre…
L’approche non-verbale permet d’ancrer la singularité de cet univers poétique. Celui-ci se déploie en une allégorie visuelle où l’inattendu, l’étrange et l’humour deviennent la règle, où la normalité est questionnée et où le jeu permet toutes les fantaisies.
Scénario et mise en scène : Ariane Buhbinder (inspirée par les premières recherches avec Léonard Berthet- Rivière) · scénographie : Sylvianne Besson · costumes : Samuel Dronet avec l’aide d’Odile Dubucq, Isabelle Airaud et Françoise Van Thienen · conception sonore : Josselin Moinet · accompagnement aux mouvements : Caroline Cornelis · maquillage : Rebecca Flores-Martinez · construction décor, aménagements, peinture : Yves Hauwaert, Sylvianne Besson, Miette Leslie De Geyter · aide décors et accessoires : Daniel Tison · interprétation : Jules et Gaspard Rozenwajn en alternance · régie de plateau et machiniste : Miette ou Hannah Kircher-Zuber · création des éclairages : Nicolas Fauchet · régie : Nicolas Fauchet ou Antony Vanderborght · photos : Gregory Navarra · graphisme et illustrations : Loic Gaume · avec la participation des élèves de 3ème année de l’école communale de Saint-Vaast et de leur institutrice Madame Laurence.