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Opus 111

Aka Moon

29.11 · Le Théâtre

Aka Moon Opus 111_Hi Res WEB_©Stefaan Temmerman

JAZZ

En plus d’être l’une des œuvres les plus symboliques de Beethoven, la sonate 32 Op. 111 pour piano (1821-22) constitue une démonstration de modernité radicale. Elle entame l’éclatement de la forme sonate, pilier formel pour tout compositeur du siècle précédent et introduit dans son deuxième mouvement une nouvelle façon de construire la phrase musicale, jusqu’à être considérée par certains comme les prémisses du jazz. Les innovations apportées notamment dans le domaine rythmique ont laissé perplexes la plupart des contemporains du compositeur.


Voici un espace idéal à investir avec le trio Aka Moon qui fait appel pour l’occasion à trois personnalités musicales : le chanteur belgo-congolas Fredy Massamba, qui introduit sa force expressive de story teller africain ; l’étoile montante de l’accordéon portugais João Barradas qui apporte une modernité urbaine avec la particularité de jouer à la fois acoustique et électronique, et le pianiste Fabian Fiorini, compagnon de longue date du trio, qui agit en tant que "musicien-miroir" de la sonate de Beethoven.
C’est dans ce carrefour de sens aux résonances multiples que Fabrizio Cassol approche cette sonate toute particulière, en synchronisant des espaces émotionnels au-delà des époques, des cultures, des points de vue sociaux ou esthétiques.

Si son titre fait directement référence à la Sonate N° 32 Op. 111 de Beethoven, cet album est avant tout un croisement aux multiples références tant musicales qu’idéologiques. Il ne s’agit pas de créer des variations au départ de cette sonate mythique, mais plutôt de voyager dans un jeu de mémoire au filigrane quasi cinématographique.
Cette épopée onirique s’inspire de la nouvelle She Talks to Beethoven d’Adrienne Kennedy, dramaturge de l’avant-garde théâtrale afro-américaine. Le récit, qui prend la forme d’un rêve, se déroule principalement au Ghana en 1961 et met en scène une écrivaine dont le mari, également écrivain de renom, disparait mystérieusement. Elle trouve alors refuge dans la correspondance de Beethoven tout en écoutant à la radio les nouvelles de son mari disparu que l’on suppose assassiné. Cette radio devient l’écho de son monde intérieur, sur fond des musiques de la rue d’Accra. Beethoven apparaît progressivement comme un fantôme consolateur, préoccupé par la fin de l’écriture de son opéra Fidelio. Une sorte d’histoire dans l’histoire, aux thématiques humanistes et post coloniales. Au fil des pages, l’évocation de la mélancolie de l’absence ainsi que l’engagement social et poétique créent un pont invisible entre l’Afrique et l’Occident à travers une vision Afro-Américaine. Le mythe d’une éventuelle africanité de Beethoven, que l’on nomma "l’Espagnol noir" fait également doucement surface dans un jeu subtil et ambigu qui laisse apparaître en son dénouement une goutte d’espoir pour notre monde d’aujourd’hui.

 

La musique de cet Opus 111 prend la forme d’un voyage, porté d’un bout à l’autre par les évocations de ce rêve. Les références à la fameuse dernière sonate, symbole de l’éclatement d’une forme emblématique et événement majeur pour tous les compositeurs de l’époque, apparaissent et disparaissent comme hantées par un esprit animé du seul désir de réconcilier.

Dans un jeu de contrepoint collectif, les invités du trio Aka Moon donnent chair à cette architecture émotionnelle et lyrique pour la transformer en une ode à la consolation, au-delà des cultures, des époques et des points de vue sociaux ou esthétiques.
Par la beauté de son chant, Freddy Massamba témoigne de son vécu d’africain en écho à la correspondance prolifique que Beethoven nous a laissée. Il met en voix la richesse de sa vie de nomade transculturel dans un flux d’émotions vécues et perpétuellement renouvelées.

L’accordéoniste João Barradas plonge la musique dans un univers à la modernité très urbaine, qu’il vivifie par des envolées visionnaires et novatrices, avec un jeu toujours entièrement dédié à l’essentiel. Il signe une cadence qu’il a nommée "Lichnowsky" et qui résume à elle seule le glissement entre tradition et modernité, symbolisé par cette sonate.

Sur son piano, Fabian Fiorini tisse, colore et sculpte les sons avec une complicité qui s’est affinée tout au long de son histoire commune avec Aka Moon. Il met en reflet les fragments de la sonate comme une mémoire refaisant surface au gré d’hallucinations et aboutit magistralement son parcours par ses variations kaléidoscopiques au piano seul en hommage au maître

Ludwig, comme s’il ne fallait pas oublier ce qui n’avait pas encore été dit.

Aka Moon : Fabrizio Cassol (saxophone, compositions) | Michel Hatzigeorgiou (basse Fender) | Stéphane Galland (batterie) + INVITES : Fredy Massamba (chant) | Fabian Fiorini (piano) | João Barradas (accordéon)

29.11 · 20:00

Théâtre de La Louvière, place Communale 22

durée : 1h30

€ 25 · 20 · 8 · Art. 27

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